Ancien DG de l’Adie, Mouhamed Tidiane Seck est d’avis que le Fonds de solidarité de 1000 milliards de FCFA, baptisé Force Covid 19 pour soutenir l’économie devraient être carrément utilisés dans l’agriculture. Spécialiste des nouvelles technologies, Seck décrypte, dans cet entretien, la portée de la Stratégie Sénégal Numérique 2025 et revient sur les enjeux de la 2e édition du Forum du Numérique clôturée vendredi dernier.
Les rideaux sont tombés sur le Forum du Numérique. Que peut-on retenir de cette 2e édition ?
La 2e édition du forum du numérique a été placée sous la thématique : « L’impact du numérique dans la lutte contre la pandémie Covid 19 et dans la relance de l’activité économique ». Bref ici l’idée c’était de voir à la fois comment au Sénégal des activités ont été mises en œuvre ici ou là du côté de l’Etat, du côté du secteur privé, du côté de la société civile, du côté des ministères en charge de la question notamment le ministère de la santé, le ministère chargé du numérique. Mais également d’autres structures comme le Crous, entre autres, structures mises en place pour lutter contre la pandémie ou essayer d’amoindrir l’impact globalement sur les populations. Ça, c’était un des éléments du thème de ce forum. L’autre élément c’est qui est-ce qui va se passer demain ? Quel pays ou quelle résilience au Sénégal et comment on va pouvoir continuer à utiliser les nouvelles technologies pour mieux lutter contre la pandémie qui est d’être terminée. Mais surtout pour voir comment les nouvelles technologies vont aider l’ensemble des autres secteurs économiques du pays à mieux résister à ces genres d’événement et à aider le pays à relancer l’ensemble de ces activités socio-économiques de telle manière que les entreprises qui étaient à l’arrêt, les activités qui étaient à l’arrêt, les secteurs qui ont été impactés de manière à les aider à repartir dans le sens d’une croissance plus inclusive pour le pays. Pour cela, ça demande une véritable réflexion nouvelle que seuls nous les sénégalais nous pouvons entreprendre partout où nous nous trouvons. Que ce soit au niveau de la sphère étatique, au niveau du secteur privé, au niveau de la société civile, au niveau des entreprises tout le monde a son rôle à jouer dans cette réflexion qui ne peut qu’être salutaire pour le pays.
Pour redynamiser l’économie Numérique au Sénégal, le Chef de l’Etat annoncé une pluie de milliards pour le financement des startups. Comment les startups peuvent-ils contribuer à son essor ?
Là on passe sur la relance de l’économie. Quelle économie devons-nous avoir dans notre pays ? Vous savez que l’un des enseignements qu’on peut tirer dans cette Covid, c’est que chaque pays a essayé de se débrouiller. Il y’a même des pays qui ont détourné des avions pour prendre les masques au détriment d’autres. Ça veut dire qu’en un moment donné personne n’a pensé aux pays pauvres. Il a fallu ici au Sénégal qu’on se débrouille, qu’on réfléchisse, qu’on innove et c’est comme ça qu’une de nos grandes forces qu’on a au Sénégal ce sont les tailleurs. Ils se sont débrouillés et ils ont fait des masques tout à fait efficaces et lavables. Cependant, les tailleurs ne pouvaient pas continuer à faire que des masques. Là ils se sont presque sacrifiés parce qu’ils n’ont pas gagné grand-chose avec ça. Par contre, il faut qu’ils reprennent leur activité normale. Donc, c’est dans ce sens-là qu’on peut parler ce que chaque pays doit faire. Moi je fais partie des gens qui dès le mois de mars disait que si on a 1.000 milliards à mettre dans la sécurité alimentaire, ça a certainement aidé beaucoup de gens. Mais personnellement, je pense que ces 1.000 milliards on aurait peut-être mieux gagné à les mettre carrément dans l’agriculture. En choisissant les spéculations que les sénégalais utilisent dans une démarche non en court terme mais en long terme. Concrètement ce que je veux dire par là c’est qu’on aurait pu dire bon, on prend une bonne partie de cet argent pour structurer un certain nombre de filières comme les filières horticoles, les filières vivrières, le mil, l’arachide, l’arachide, la tomate… Il ne s’agirait pas, de mon point de vue, juste aider à produire, mais il s’agirait pour moi de commencer à structurer une filière complète avec non seulement un choix de semence, une agriculture un peu mieux étudié avec des jeunes qu’on amenerait retourner dans la terre. Que derrière qu’on mette en place des systèmes de stockage. Parce que quand on produit, il faut stocker et transformer aussi. Ça aurait créé des emplois et de promouvoir le consommer local. On aurait donc créé une véritable filière économique basée sur le secteur primaire, sur le secteur secondaire qui est la transformation industrielle et le secteur tertiaire ce serait la logistique, la distribution, la mise en conditionnement et la vente. Pour qui ? Pour les sénégalais et donc la boucle est bouclée. C’est ce genre de chose qu’il faudrait qu’on fasse. Vous voyez aujourd’hui avec l’histoire du sucre. On peut dire ce qu’on veut mais moi je préfère qu’on produit le sucre ici au Sénégal et qu’on crée nos industries ici au Sénégal et qu’on vend notre sucre ici au Sénégal pour les sénégalais. Même si ce sucre-là aurait pu coûter un peu plus cher mais c’est possible. On peut le faire dans tous les domaines.
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Lors du Forum, il a été question d’une Agriculture Numérique. Qu’en est-il réellement ?
Les nouvelles technologies dans l’agriculture ou dans l’élevage c’est quoi ? C’est le fait d’avoir aujourd’hui des objets connectés qu’on va positionner dans les campagnes, dans les champs pour regarder la température, les besoins en eau du sol,… Les objets connectés sont à notre portée et c’est ce qu’on appelle aujourd’hui l’agriculture intelligente. De la manière on a des bétails qui sont volés. On doit mettre des objets connectés pour surveiller le bétail et savoir où mettre des abreuvoirs pour que le bétail aille boire. C’est pour qu’il ait une bonne conjonction entre les besoins du bétail et la ressource qu’on leur apporte pour leur alimentation. Pour cela, il faut une réflexion vraiment endogène faite par les compétences sénégalaises.
Le secteur informel a été terriblement affecté par la crise sanitaire, car ne connaissant pas le télétravail. Comment bâtir une résilience digitale post COVID- 19 ?
Si on regarde le rôle des nouvelles technologies nous avons vu que lorsqu’il y a eu une restriction dans les déplacements des uns et des autres notamment ce qu’on appelle confinement ou couvre-feu. Les gens peuvent continuer à avoir une activité en utilisant le net en restant chez eux, en évitant de se déplacer. C’est ce qu’on appelle globalement le télétravail. Mais au-delà du télétravail, nous avons vu que pour manger les gens ont évité d’aller dans les restaurants. Et ceux qui ne pouvaient pas cuisiner chez eux se sont vus servir leur alimentation par tout ce réseau de jeunes qui, avec leurs scooters et des organisations assurent la logistique. Et donc, la livraison à domicile. Ce secteur-là a été boosté par la pandémie. Mais quand on voit comment ça se passe c’est qu’il faut que les gens fassent leurs commandes en ligne ou par téléphone et le leur livre chez eux. Mais le livreur pour venir chez eux il utilise le Google Maps ou bien il appelle la personne et cette dernière lui indique où il se trouve. Systématiquement dans ces domaines on a utilisé les nouvelles technologies. Idem dans le secteur des transports. Vous avez dans ce secteur il a fallu en un moment donné mettre en place des listes ou bien pour se déplacer de région en région, il a fallu accéder à un site web du ministère de l’intérieur pour demander une autorisation. On a même vu des applications qui ont été développées avec des codes pour que les gens qui montent dans les bus puissent être identifiés de telle façon que si un jour quelqu’un parmi eux attrape le virus, on sait qui a été dans ce bus. Et de ce point de vue là on a pu pouvoir localiser des cas contacts. C’est la même chose pour le transport aérien. Donc tout ça a été fait par les nouvelles technologies. L’autre point c’est le transfert d’argent. Les gens ont arrêté de se déplacer pour souvent aller chercher de l’argent ou bien pour payer leurs prestations. Ils l’ont fait en utilisant très largement la monnaie électronique. Il y’a énormément d’exemple qui montrent que les nouvelles technologies ont été très impactant. Certains en ont tiré d’ailleurs des bénéfices. Même si d’autres en ont souffert.
Pouvez-vous nous expliquer la mise en place d’une base de données géospatiale pour lutter contre les litiges fonciers au Sénégal ?
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C’est en gros trois choses. C’est d’abord les populations qui vivent dans le pays. C’est la géographie du pays c’est-à-dire les limites territoriales (régions, départements, communes,…). Où se trouve cette information capitale ? Donc on a besoin de connaître les individus qui vivent dans le pays. On a besoin de connaître la géographie du pays. On a aussi besoin de connaître les entreprises qui évoluent dans le pays. Si on ne maîtrise pas ça il y’a un réel problème. Il nous faut un système d’information foncier qui est au niveau national qui soit fiable. Donc c’est une exigence fondamentale.
Le Sénégal peut-il accéder à la souveraineté numérique d’ici 2025 ?
La stratégie numérique 2025 a été lancée en 2017. Il y’a une révision qui a été faite cette année. Je pense qu’on risque de ne pas atteindre tous les objectifs parce qu’on a connu un peu de retard. Mais je pense que les autorités et les agents du ministère de l’économie numérique sont en train de travailler à ce que la stratégie numérique soit mieux suivie. On a un déficit de suivi.