En juillet 2021, le Président Macky Sall inaugurait à Louga, au nord-est au Sénégal, la troisième usine de traitement d’eau potable Keur Momar Sarr 3 (KMS3). La firme considérée par ses concepteurs comme étant le plus grand ouvrage hydraulique jamais construit au Sénégal, devrait étancher la soif de 4 millions de Sénégalais. A ce jour, Dakar et sa banlieue peinent encore à avoir accès régulièrement à l’eau. Se réveiller en pleine nuit pour obtenir le liquide précieux reste toujours d’actualité. Ce, en partie, à cause des incidents liés aux travaux du Bus Rapid Transit que la S’en Eau a du mal à résoudre.
Implantée dans la région de Louga, la troisième usine de Keur Momar Sarr a été inaugurée samedi 10 juillet 2021, par le Président Macky Sall. Elle apporte un volume supplémentaire de 200 000 m3/j. Conçu par la Société nationale des eaux du Sénégal (Sones), cet ouvrage hydraulique a pour but d’améliorer de façon substantielle la fourniture en eau à Dakar, Thiès et d’autres localités.
Le président de la République, Macky Sall a lui-même affirmé que cette usine devrait régler le manque d’eau à Dakar le jour de l’inauguration. « Je suis venu inaugurer l’usine de Keur Momar Sarr 3 pour marquer la priorité élevée que j’accorde à deux secteurs vitaux pour la nation: l’eau potable et l’agriculture moderne. Ce complexe moderne comporte une grande usine de pompage et de traitement d’eau potable ainsi qu’une conduite vers Dakar de 216 Km de tuyaux avec une production de 150.000 M3 d’eau par jour et dont la capacité est de 200.000 M3 d’eau. Ceci devrait régler de façon durable la question de l’approvisionnement pour toutes les localités traversées par le tuyau sur l’axe Dakar, Mbour et Thiès. L’impact est déjà réel. Dakar doublera sa capacité de production avec un débit de 550.000 M3 par jour contre 266.000 il y a neuf ans », se réjouissait-il.
Les mêmes assurances ont été données par le Directeur Général de la Sones, Charles Fall. A l’en croire, grâce à la mise en service de KMS3 le 28 avril 2021, « une nette amélioration de l’accès à l’eau potable » a été notée dans la région de Thiès et Dakar, particulièrement les zones anciennement déficitaires : Niary Tally, Grand Dakar, les Parcelles-Assainies, la cité Lébougui, la cité Gendarmerie, Jaxaay, Almadies 2, etc. Selon ses estimations, les nouveaux branchements permettent l’accès à l’eau potable à plus de 700 mille personnes supplémentaires dans des zones urbaines ou périurbaines non desservies jusqu’à présent.
- Advertisement -
Bientôt un an après l’inauguration, les habitudes de certains ménages dakarois n’ont pas changé. Dans les Parcelles Assainies par exemple, l’accès à l’eau est toujours problématique. Pour obtenir le liquide précieux, il faut se lever à 3 heures ou 4 heures du matin comme d’habitude. Durant la journée, pas une goutte d’eau ne suinte des robinets.
Vers l’Unité 6, la situation est la même. M. Sané, père de famille résidant au 2e étage, se lève aussi vers 2 heures du matin pour puiser. « Il faut que je le fasse, sinon madame n’aura pas d’eau pour la cuisine, la vaisselle et autres. A cause des sommeils entrecoupés, il arrive que je sois en retard au bureau. J’ai plusieurs fois été mis en garde par mon supérieur. Mais que faire ? », se demande-t-il.
Idem pour Madame Diop. Cette maman se voit obligée de couper son sommeil tous les jours. « Depuis des années, rien a changé chez nous. Je me réveille en pleine nuit pour remplir les bidons, les bassines et les barils. Car durant la journée l’eau ne coule pas dans les robinet ».
Ce manque d’eau durant la journée peut souvent devenir général dans certains quartiers. Il arrive que des ménages qui avaient l’habitude d’avoir l’eau 24h/24, soient privés du liquide, à cause des travaux de réparation de fuite sur les conduites transportant de l’eau ou encore de réparation de conduite percée par des entreprises travaillant sur le projet du Bus rapid transit (Brt).
Approvisionnement en eau, casse des conduites, la S’en Eau s’explique
- Advertisement -
Interrogé par PressAfrik, Papa Abdou Mbaye, directeur régional de la Sen’Eau à Dakar s’est expliqué sur la déserte d’eau et les incidents liés aux travaux du Bus rapid transit. A l’en croire, « la déserte de l’eau sur Dakar est globalement satisfaisante ». « Depuis mercredi, nous avons des travaux de réparation d’une fuite qui est survenue sur la conduite qui assure le transfert de l’eau sur Dakar, depuis la nouvelle usine de Keur Momar Sarr 3. Nous avons des perturbations sur un certain nombre de quartiers du fait de la réduction de l’apport d’eau qui nous vient de l’usine. Mis à part cet incident qui est un peu conjoncturel, il faut dire que la déserte de l’eau sur Dakar est globalement satisfaisante ».
D’après le directeur régional, « plus de 98% des quartiers ont de l’eau en présence continue ». Il reste quelques poches qui sont déficitaires. Il s’agit, précise-t-il, des zones qui se trouvent autour des Mamelles, qui, du fait de leur position topographique, sont mal alimentées. Mais, rassure-t-il, par rapport à cela, ils sont en train de reprendre la reconfiguration du réseau pour pouvoir les faire sortir de ces quartiers qui sont déficitaires.
Evoquant le cas des Parcelles Assainies, M. Mbaye a fait savoir que les quartiers sont relativement bien alimentés, tout en soulignant quelques difficultés dans certaines zones pendant les heures de pointe. « Au niveau des Parcelles assainies, si nous n’avons pas d’ouvrage de production en arrêt pour des travaux d’entretien ou bien des réparations de fuites qui sont liées à des incidents sur le réseau, les quartiers sont relativement bien alimentés. Pendant les heures de pointe ou bien pour les populations qui se trouvent à des étages supérieurs, en l’absence de dispositif de réservoir et de suppresseur, naturellement, ces gens peuvent manquer d’eau ».
Récurrence des casses de conduites malgré les efforts
Depuis le début des travaux du Bus rapid transit, il est courant de voir à Dakar des casses de conduite d’eau pouvant entrainer un arrêt en approvisionnement. S’expliquant sur les incidents, Papa Abdou Mbaye a soutenu que malgré les efforts fournis par la société, ils continuent à enregistrer des casses. « C’est ce que nous appelons dans notre jargon, les casses-tiers. Aujourd’hui sur Dakar nous avons un certain nombre de chantiers qui sont ouverts. Et ils consistent, par moment, à faire des terrassements. Qui dit terrassement dit risque de heurter des canalisations qui sont enterrées. Et malgré tous les efforts en termes de mise à disposition des plans qui montrent le tracé de nos canalisations et les déplacements de nos agents sur le terrain, il nous arrive fréquemment et régulièrement que des accidents viennent casser nos canalisations. Ce qui nous oblige à arrêter le service d’eau et à procéder à des réparations avant de pouvoir remettre le service ».
Au regard de l’impuissance de la S’en Eau à trouver une solution définitive à la récurrence des casses de ses conduites, les Dakarois vont donc prendre leur mal en patience en termes d’approvisionnement régulier en eau. Puisque selon le directeur du Conseil exécutif des transports urbains de Dakar (CETUD), Thierno Birame Aw, c’est au début du premier trimestre de l’année 2023 que les travaux du projet BRT seront livrés, avant la phase pratique dans les communes concernées.
PressAfrik